2. L’apprentissage des règles

La plupart des règles sont connues de nos élèves mais ne sont pas appliquées. C’est en répétant le plus souvent possible les lois lexicales et grammaticales et en faisant écrire les élèves qu’une forme d’automatisation peut s’établir. La mémorisation de paradigmes, qui peut commencer en classe, est importante : elle peut d’ailleurs être difficile à obtenir, pour des élèves peu habitués à apprendre, notamment en ZEP où le travail personnel, à la maison, reste quasiment inexistant. La « clef de la mémorisation », pour reprendre la terminologie utilisée par Michel Gey dans ses ouvrages, est primordiale. Toutefois, cette mémorisation, seule, ne suffit pas ; il faut ensuite pratiquer l’écrit, en réutilisant les notions pour se les approprier totalement.

Durant cette recherche-action, une grande importance a également été accordée à la "simplification » des règles. Les règles ont été le plus souvent formulées à partir de l’observation d’un texte, y compris des productions des élèves. Les enseignants ont fait le choix d’une part d’évacuer, autant que possible, un métalangage grammatical trop abstrait et/ou des procédures d’analyse trop complexes, d’autre part de privilégier les comptines, les moyens mnémotechniques et les clés autres que celle de l’analyse grammaticale. L’enseignant et les élèves ont souvent trouvé ensemble la formulation de la règle. Les règles dégagées par les élèves ou les "trucs" jugés amusants sont plus faciles à retenir. L’essentiel n’est pas obligatoirement d’approfondir la leçon d’orthographe mais au contraire de trouver ensemble des procédures rapides, faciles à mémoriser afin que l’élève ne soit pas obligé de s’arrêter longuement pour réfléchir à l’orthographe d’un mot, que ce soit dans l’exercice de dictée qui ne lui en laisse pas le temps ou dans la rédaction où il risque de perdre le fil de sa pensée. Parfois, la formulation retenue omet une partie de la réalité orthographique et/ou peut apparaître bien naïve à un esprit soucieux de rigueur scientifique, mais dans la mesure où ces petites règles permettent de limiter un grand nombre de fautes, les enseignants ont choisi de les donner, satisfaits déjà si leurs élèves maîtrisaient les grandes régularités et ne se trompaient que sur des exceptions ; de plus, on n’oubliera pas qu’un collégien dispose de quatre années pour construire les compétences attendues et que tout n’est donc pas exigible en classe de Sixième, y compris dans le domaine de l’orthographe. Par exemple, dans le cadre de l’apprentissage des conjugaisons, on a pu délaisser la conjugaison des verbes en - indre et - soudre au présent de l’indicatif, pour consacrer plus de temps aux verbes plus usités et plus réguliers.

Les manuels Hatier de J. et J. GUION, Apprendre l’ O.R.T.H.O GRAPHE, notamment l’ancienne édition destinée aux élèves de LEP, fournissent un bon exemple de la méthode adoptée, car ils ne s’embarrassent pas de formulations compliquées et détaillées. Ils préfèrent inciter les élèves à analyser des exemples bien choisis en leur proposant une méthode d’apprentissage fondée sur des moyens mnémotechniques plus efficaces qu’une longue leçon. Les élèves apprennent à poser des questions bien ciblées qui les aident à choisir la bonne orthographe. Par exemple, pour l'accord du participe passé avec l'auxiliaire AVOIR ou l’accord sujet/verbe, le manuel propose la méthode suivante :

EXEMPLE 1 :

Elle a acheté … Qu'est-ce qui est acheté ? Je ne l'ai pas encore écrit, alors pas d'accord. Elle a acheté des revues.

Les revues qu'elle a achetées sont ennuyeuses. Je sais ce qui est acheté ? des revues (féminin pluriel) donc j'accorde le participe passé avec "les revues" : ées

EXEMPLE 2 :

Mon oncle et ma tante élèvent des chevaux.

1 + 1 = 2

On voit dans le premier exemple que le manuel ne se tourne pas vers des notions et des analyses grammaticales avec recherche du « COD placé avant ou après le participe ». Il propose au contraire une méthode rapide et qui ne pénalise pas les élèves qui manquent de connaissances grammaticales. De même pour le deuxième exemple : on ne parle pas d'un « GN constitué de 2 sous-groupes » pour justifier la terminaison du verbe.

La présentation visuelle avec des flèches, des mots entourés ou encadrés, facilite également la perception et la mémoire. Le manuel destiné aux classes de LEP propose même un questionnaire (« Avez-vous bien lu le tableau de la règle ? Répondez par oui ou non ») après la présentation de la leçon afin que l’élève puisse vérifier qu'il a bien compris la règle.

Les cahiers pratiques de Michel GEY, ORTHO PLUS, aux éditions Nathan proposent également un apprentissage très concret de l’orthographe. Ils offrent en effet aux élèves des clefs qui peuvent leur permettre de résoudre leurs problèmes : la clef de la substitution, bien connue, consiste par exemple à remplacer un mot par un autre (ex : elle a mangé = mordu ), la clef de la dérivation consiste à faire appel à la famille d'un mot pour connaître son orthographe ( ex : galop / galoper) . La démarche du livret est progressive : chaque leçon est précédée d'une phase d'observation puis prolongée par des questions et les exercices renvoient à une des clefs.

Les enseignants ont mis en commun les différents « trucs » qu’ils ont pu utiliser pour se constituer une " banque de données" : ces différents moyens ont été regroupés par clef.

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I - CLEF DE LA MEMOIRE

1- L’ancre d'un bateau commence par A comme amarre, l'encre d'un stylo commence par E comme écrire.

2- Apercevoir prend un P car on n'aperçoit que d'un œil.

3- L'hirondelle a besoin de 2 L pour voler.

4- Le seau se remplit d'eau, le sot est un idiot.

5- Viens mon chou, viens mon bijou, laisse tes joujoux, monte sur mes genoux pour lancer des cailloux aux vilains hiboux pleins de poux.

6- pour retenir les prépositions (qui introduisent infinitifs) : Adam part pour Anvers avec 200 sous sur lui. (à dans par pour en vers avec de sans sous sur (lui)

A 2 pour cent : à de pour sans.

7- Mourir et courir ne prennent qu'un R car on ne meurt qu'une fois et tous, nous courons à la mort.

Mais on se nourrit plusieurs fois.

8- AGRIPPER : un G, 2 P car il est âgé pépé…

9- Château /bateau : le château est assez solide pour supporter le ^ pas le bateau.

10- BOTTE et CHAUSSURE : deux T deux S car j'ai deux pieds.

11- Les noms et adjectifs en AU, EAU et EU ont le pluriel en X sauf pneu et bleu (Les pneus ne sont pas bleus)

12- Les deux accents du mot déjà forment des « moustaches ».

 

II - CLEF DE LA POSITION

1- N se transforme souvent en M à la fin d'un préfixe devant un radical commençant par B, M, P.

Se rappeler : les pompiers emmènent les blessés en ambulance.

2- Le mot réverbère résume toutes les lois de l'accentuation.

ré - : quand « e » termine une syllabe écrite, et que la suivante ne comporte pas de e muet , accent aigu.

- ver - : pas d'accent quand la voyelle est suivie de 2 consonnes.

- bè - : quand « e » termine syllabe écrite et que la syllabe suivante comporte un « e » muet…

- re : on n'accentue jamais « e » muet.

 

III - CLEF DE LA PRONONCIATION

1- Pour retenir qu’il faut une cédille avant le O quand on veut le son [ s] , mais pas devant i et e .

Le maçon qui travaille comme une limace a les doigts pris dans le ciment.

2- Mieux vaut prendre du poisson que du poison.

3- L'impératif est en E pour les verbes dont l'impératif se termine par une syllabe muette, en S pour les autres. (sauf « Va »)

IV- CLEF DE LA DERIVATION

1- pour démasquer une consonne muette à la fin d'un mot

(Ce qui peut permettre aussi de différencier deux homophones comme point et poing / pointer, ponctuation et empoigner, poigne).

2- Le mot canard permet de mettre N à CANE. ( / canne)

3- Flamber avec A comme Flamme

4- Immense avec E comme mesure…

 

V- CLEF DE LA SUBSTITUTION (démarche bien connue, qui se heurte souvent au problème du besoin de synonymie éprouvé par les élèves ; on s’efforce donc de ne pas modifier le sens de l’énoncé initial d’une manière trop arbitraire)

1- Quand on hésite entre é et er, remplacer par un verbe du 3° groupe

+ je pose la question "faire quoi ?"avant le verbe en (e). Si je peux donner la réponse, on écrit « er »

Ex : Il vient de QUOI FAIRE ? dessiner

Il a QUOI FAIRE ? dessiné : question/réponse impossible

2- pour différencier des homophones, on peut remplacer :

- Mes : par tes.

3- Pour différencier des homophones dont certains sont des verbes, les mettre à l'imparfait

4- Quand on peut remplacer « quand » par lorsque, on écrit quand.

5- Qu'elle s'écrit en 2 mots quand on peut le remplacer par qu'il.

 

VI - CLEF DE L'ANALYSE

1- Pour savoir si un verbe est du 2° gr. Il suffit de penser à son participe.

On peut se trahir en rougissant.

2- Quand LEUR est un pronom personnel, il est invariable.

3- Au pluriel, les noms prennent le plus souvent un S, plus rarement un X.

4- Comment reconnaître un verbe conjugué dans une phrase ? C'est le seul mot qui va changer si on met "demain" ou « hier » au début de la phrase.

5- Comment différencier COD et CC ? Rajouter "et cela se passe" ou "et il le fait" - Rajout possible avec un CC

Exemple : Le boulanger travaille la nuit / Le boulanger travaille la pâte.

Le boulanger travaille et cela se passe la nuit.

6- Pour trouver l'infinitif d'un verbe quand on le trouve conjugué dans un texte, se demander "et qu'est-ce qui l'empêche de ?" (Normalement, l'infinitif vient spontanément…)

7-Accord participe passé avec avoir :

Etape 1 : si je reconnais l'auxiliaire « avoir », je barre au crayon le sujet.

Etape 2 : si, lorsque j'écris le participe passé, je connais le COD, il y a accord entre le participe passé et le COD.

Ex : elle a vendu QUOI ? (je ne le sais pas encore, donc pas d'accord)

Les disques qu'elle a vendu QUOI ? des disques donc accord : vendus

8- Accord du participe passé (pp) en (e) sans auxiliaire : si je peux rajouter "qui est" ou "qui sont" avant le verbe en (e), c'est un pp que j'accorde avec le nom auquel il se rapporte (ou comme un adjectif qualificatif)

Ex : les coureurs (qui sont ) fatigués s'arrêtent.

9- Accord sujet/verbe : au moment où j'écris le verbe, je m'arrête, je cherche le sujet en disant "c'est …….. qui + verbe"

Ex : Les rollers de mon frère< roule ?> (ce sont les rollers qui roulent ) mieux que les miens.

Ex : Votre sœur les soigne ? (c'est ma sœur qui soigne) bien.

10- Quand il y a « tu », il y a « s ».

11- Quand il y a « avoir » et « être » (ex. « Elle a été enlevée »), on prend la règle avec être car il est plus important d’être que d’avoir.

 

VII - CLEF DE LA PLACE

1- Devant un verbe conjugué, « leur » est toujours invariable.

2- Lorsque QUELQUE est placé devant un nombre, c'est un adverbe, qui signifie environ, il reste invariable.

3- Après une préposition, le verbe est un infinitif présent.

4- «  Les, des, mes, tes, ses, nos, ces, plusieurs, quelques » sont contagieux : ils donnent leur « s » à ce qui suit.